lundi 31 octobre 2022

Les Montagnes dans les nuages, récit de voyage, Double Marge, article entier, 2022

Article Double Marge 31 août 2022.

Il est des livres, plus hospitaliers que d’autres, qui vous accueillent avec une enveloppante générosité. Ce récit de voyage est de ceux-là, sans apprêt, empli de bienveillance, on s’y sent vite chez soi.

Les Montagnes dans les nuages ouvre la trilogie d’un voyage initiatique vers un bouddhisme qui ne se laisse pas apprivoiser facilement. Une quête de soi où avoir l’assurance tranquille de ceux qui avancent sans cartes et sans compas se construit peu à peu. Suivront La voyageuse immobile et La vieille dame au coeur du volcan.

Dans ce premier acte, Adèle O’Longh, sur un coup de tête, se lance dans un périple en Chine en compagnie de son maître de qi-gong M. Lin, vieil homme débonnaire et malicieux, « un tiers de professeur, un tiers de père adoptif, un tiers d’ami » .

Pleine de fraîcheur et de spontanéité, elle va nous entraîner avec maestria à la découverte de petits bouts de Chine : le Pékin populaire d’abord, secret, où s’écrit l’histoire des habitants au jour le jour, la ville avec ses petites ruelles, ses hôtels miteux… Le regard panoramique de l’auteure balaie les scènes de rue comme autant de photos prises en rafale. On décèle son amour des plaisirs simples et sans malice, sa tendresse pour les petits riens du quotidien, sa capacité à nous les rendre essentiels. Ici réside la magie de ce voyage où on apprend à guérir les malades grâce à un pouvoir énergétique acquis au fil du temps.

Chaque journée est pleine d’inattendu et de mystère. Autant d’expériences qui se méritent et exigent une disponibilité totale pour qui veut devenir un initié. Il faudra abandonner ses certitudes, son rationalisme, pour accueillir « ce pays de légendes, dragons, arts martiaux et dix mille merveilles » et poursuivre le chemin. Adèle O’Longh attrape chaque moment vécu avec un regard gourmand sans perdre un point de vue critique dénué de tabou pour nous dresser le tableau de certaines villes pauvres et désolées. Les paysages défilent devant nos yeux, étranges et familiers, avec la sensation intense dont parle l’auteure d’être rentré chez soi.

Une infinie poésie baigne le récit : description des paysages de montagnes de Guilin, montagnes isolées du bruit du monde, « protégées du fracas de l’Histoire ». L’énumération des villes pendant ce périple : Yangshuo, Shuanglong, sonne comme une invitation au voyage et prépare la rencontre décisive avec les Montagnes dans les nuages. Le récit raconte l’essence même du bouddhisme : ne pas s’attacher aux lieux, aux objets ; se rappeler que les êtres sont de passage toujours parce que l’impermanence est le fondement de toute vie. Quel plus bel exemple que l’amour de l’écrivaine pour le mouvement glissant des nuages mais aussi cette capacité qu’elle nous décrit de se trouver à l’endroit exact où l’on doit être? Tout passe alors à quoi bon s’enraciner ? La dynamique de la vie est dans l’acceptation du changement, du toujours ailleurs. Les dieux du Tao enseignent cette sagesse.

Adèle O’Longh nous offre de belles pages, dans une langue simple, sans préciosité ni fioritures, pour apprivoiser les finesses d’un vécu intérieur singulier qui renvoie à l’alternance de l’unicité de l’être et de la séparation. Si on s’y reconnaît on s’en trouve apaisé, voire ému. Nous passons sans heurts des figures taoïstes aux rencontres de hasard, personnes bienveillantes qui jalonnent l’itinérance de l’auteure. L’immersion hors des sentiers battus au plus près de l’authenticité chinoise constitue un voyage par procuration riche en scènes inoubliables. « Vivre en permanence dans l’instant. Et chaque instant alors se suspend, chaque instant, parce qu’éphémère, devient éternel ?  Parce qu’éphémère et éternel, en dernière instance, n’existe pas, seule existe la suspension ? »

Ce livre a une musicalité reconnaissable entre toutes, pleine de douceur et de poésie : « Le ciel. Un grand ciel bleu où passent des nuages blancs, légers comme des voiles. (…) Les nuages glissent sur du bleu infiniment bleu, ici. (…) Bientôt, j’irai toucher le ciel avec les doigts. »

On trouve de tout, rires et colères, obsessions et ratages, scènes hilarantes… Avec ce récit gorgé de lumière, une part d’Adèle O’Longh, inatteignable, semble être restée dans ses pages. Et c’est très bien car ce livre est nécessaire.

Francine Klajnberg

Les Montagnes dans les nuages, Récit de voyage, Double Marge, 2022

dimanche 31 octobre 2021

La Vieille Dame au cœur du volcan, roman, Le Temps des Lettres, 2021

 

 Le Temps des Lettres , article entier, 2021.

La Vieille Dame au cœur du volcan de Adèle O'Longh.

Adèle O'Longh excelle dans la description de l'âme humaine qui donne toute sa mesure au bord de l'abîme. Sa vision de la vie portée au rang d'art majeur par une écriture originale est une invitation à larguer les amarres pour mieux se trouver. 

" Elle a pris appui sur son bâton et rabattu son chapeau de paille en arrière.
– Et toi ? Elle m’a demandé.
– Oh moi, j’ai répondu, je suis une âme égarée.
J’ai dit ça sans réfléchir. Légèrement. Avec une douce ironie. Pour l’amuser peut-être, je croyais. Mais Sarah a hoché la tête. Elle m’a regardée, et j’ai eu l’impression de devenir liquide, complètement transparente, de me dissoudre dans ses yeux noirs. Puis elle a eu ce sourire dans le regard, malicieux sourire que j’ai tant aimé.
– Aucune âme n’est égarée quand elle parle comme tu viens de le faire, elle a dit. On se partagera quelques dattes, si tu veux entrer.
Elle a écarté les tissus masquant la porte de sa maison, et je l’ai suivie à l’intérieur. "

Après la Lune, 2021.

 

dimanche 18 juillet 2021

Les Montagnes dans les nuages, Récit de voyage - Lire Zen - 2020

Lire Zen, article, 2020.

Tout voyage réussi est avant tout un voyage intérieur. Celui d'Adèle O'Longh est exceptionnel ; c'est une expérience du "dehors" qui conduit notre narratrice dans une Chine secrète et mal connue, pays qui la transformera profondément. Ce livre intense est aux antipodes de l'exotisme surfait. Accompagnée d'une écriture tendue, dépouillée et d'un rythme alerte, la vision de la Chine est décrite avec humour et tendresse.

Le voyage d'Adèle O'Longh est passionnant. Intelligente, créative et hardie, la jeune femme reste constamment en éveil. Dans les pas de son vieux maître de taichi haut en couleur, elle nous emporte dans un récit excellemment écrit. 

Les Montagnes dans les nuages, Lire Zen, 2020

jeudi 15 juillet 2021

La Vieille Dame au cœur du volcan, roman, Lire Zen, 2021

 

Lire Zen, article entier, 2021.

La Vieille Dame au coeur du volcan de Adèle O'Longh

Alice campe sur un bateau dans le port de las Palmas. Vidéaste fuyant le monde de l’image, embarquée sur un coup de tête pour un convoyage de voilier à Cuba, elle a été débarquée aux Canaries par des marins peu délicats. Déboussolée, elle erre dans le port au milieu des cargos et des containers, prend des bus au hasard, ou arpente les rues de la ville comme autant de voies ne conduisant nulle part. Un jour, au creux de l’ancien cratère du volcan de Bandama, elle découvre une vieille ermite. 

La Vieille Dame au cœur du volcan du volcan est un roman époustouflant. Que faire lorsqu'on n'est plus en accord avec ses valeurs? Partir.
 On cherche tous une île où se réfugier pour trouver notre paysage intérieur. Alice rencontre une femme de sagesse pour la guider dans sa quête initiatique.


La Vieille Dame au cœur du volcan de Adèle O'Longh, publié aux éditions Après la Lune.



mercredi 30 juin 2021

La Vieille Dame au cœur du volcan, roman, Voix littéraires, 2021

Voix littéraires, Article mai 2021

La Dame de Adèle O'Longh

Si à l’heure actuelle, la seule issue pour l'humanité est de changer, nous savons que ce changement doit également s'opérer de façon individuelle. La Vieille Dame au cœur du volcan fait partie des textes pouvant nous aiguiller en ce sens. À travers lui, Adèle O'Longh questionne société du spectacle et atrophie collective. Loin des romans insipides où la vie se présente comme une promenade de santé, il est sans complaisance dans la radiographie de nos sociétés en perte d’illusions et leur prédation structurelle. Sa richesse thématique incite à l'introspection et nous renvoie à nos propres choix, servie en cela par une écriture fulgurante.

Adèle O'Longh, La Vieille Dame au cœur du volcan, Après la Lune, 2021.

Les Montagnes dans les nuages, Récit de voyage, Double Marge, article entier, 2021

 Article Double Marge 31 mai 2021

« Tu veux aller en Chine ? Monsieur Lin, dont je connaissais tout juste le nom à ce moment-là, me regardait, la casquette posée sur le côté, presque à l’apache, sa main appuyée sur une canne à tête de dragon. Il souriait et ses yeux se bridaient davantage derrière ses lunettes […] Tu veux aller en Chine ? Je ne disais rien. Je continuais à sourire, moi aussi, en regardant sa canne. J’étais décontenancée […] D’accord, j’y vais ».

Monsieur Lin est un homme espiègle. Il enseigne les arts martiaux mais il peut tout aussi bien pratiquer l’imposition des mains ou réhabiliter les maisons hantées. Il vit à Arrucas, dans les Canaries où il se sent bien. Celle qui est devenue son élève et qui s’apprête à découvrir la Chine est une fille aux cheveux roux dont les yeux légèrement étirés pourraient laisser croire à une parenté éloignée.

Leur pérégrination vers Les Montagnes dans les Nuages commence dans la touffeur de Pékin. La voyageuse à la chevelure de feu et Monsieur Lin n’y passent pas inaperçus. Occupés à jouir du spectacle de la rue, ils en oublient les regards amusés. Le dédale des hutong où résonne la voix des petits métiers, les tenues bigarrées, les cheveux de toutes les couleurs, les teints délicats, les musiciens dans les parcs, tout est enchantement. Enchantement aussi lorsque le voile gris de la ville minière de Datong disparaît devant la beauté des bouddhas géants.

Au fil des jours, le voyage vers les Montagnes dévoile sa géographie et son humanité. Il apparaît aussi comme un puissant révélateur du travail énergétique. Apprendre à « Laisser toute distance et toute peur au vestiaire ». Monsieur Lin encourage et rassure. La journée commence invariablement par une séance de qigong. Parfois, la simplicité, la gaité, les « rires juvéniles », partagés entre deux cigarettes, font oublier « l’obsessionnelle hygiène de vie professée en Occident […] je suis heureuse d’être ici. Je suis à l’aise, calme, et j’ai parfois la sensation, fugace, d’être rentrée chez moi ».

Au cœur des Montagnes dans les Nuages, la magie opère. « Voir le jour se lever devant ces moines aux mouvements de brume est l’une des plus belles choses qui me soient jamais arrivées ». A peine installée, notre voyageuse met cap au sud, en solitaire. De nouveaux visages l’attendent. S’attarder un peu. Oui, mais les signes qui ne mentent pas lui intiment de rebrousser chemin. La Montagne s’impatiente. La rencontre avec Lu Long, le Dragon vert, se rapproche. Lu Long, le semblable, l’ « ami de l’ici et maintenant » …

Le récit littéraire d’Adèle O’Longh nous aide à repenser notre vision du monde. Libérée des codes occidentaux, la narratrice s’abandonne au spectacle de la nature et des êtres qu’elle rencontre, qui la ramènent doucement à elle-même, à la Montagne bleue.
… Mais qui a dit qu’il fallait traverser les mers pour résider en ce lieu ?

Elisabeth Dong

Les Montagnes dans les nuages, Récit de voyage, Double Marge, 2021

mardi 15 juin 2021

La voyageuse immobile - Lire Zen - 2020

 « Un virus qui s’en prend au cœur, c’est tellement singulier… Ne reviens pas Gaële, ne viens pas te transformer en garde-malade, cours plutôt, navigue, vole, comme tu l’avais décidé. C’est ce que tu peux faire de mieux pour moi. Mais s’il te plaît, écris-moi, envoie-moi des mails, raconte-moi ce que tu vis, ce que tu vois, et si tu ne vis et ne vois rien que tu aies envie de me relater, tu pourras toujours inventer. »

Confiance et résilience sont les maîtres mots de ce récit épistolaire servi par une très belle plume. Un roman inspirant. 
 
La voyageuse immobile, Lire Zen, 2020 

https://lirezen.blogspot.com/2020/05/la-voyageuse-immobile-de-adele-olongh.html


Les Montagnes dans les nuages, récit de voyage, Double Marge, article entier, 2022

Article Double Marge 31 août 2022. Il est des livres, plus hospitaliers que d’autres, qui vous accueillent avec une enveloppante générosit...